La Revue Française de Généalogie proposait en ce froid mois de novembre un séminaire de trois jours consacré à la découverte des archives judiciaires, et à leur utilité dans nos recherches généalogiques.
Je n’ai pas résisté à l’appel des chouquettes et à la curiosité.
Le stage était animé par Jerôme Malhache, grâce auquel je m’étais lancée l’année dernière à l’assaut des archives militaires, avec beaucoup de bonheur. J’espère que cette fois ci encore, je vais pouvoir utiliser ce que j’ai compris de ses explications, toujours claires et dans une ambiance conviviale, pour ouvrir de nouvelles portes et débloquer certaines de mes branches.
Commençons par préciser sur quoi portait le séminaire : il n’a été question à aucun moment des archives criminelles, le séminaire était centré sur tout ce que le généalogiste lambda, qui n’a pas encore retrouvé le pendu qu’il est supposé avoir quelque part dans son arbre, peut trouver à travers les archives judiciaires civiles.
Et que peut on donc trouver de si passionnant ou instructif ?
- Les conseils de Famille et les nominations de tuteurs pour les orphelins de nos arbres. Tout décès de parent, père ou mère, d’un enfant mineur entrainait un conseil de famille, devant la juridiction de proximité, prevôt ou sénéchal sous l’Ancien Régime, juge de paix après la Révolution. Si un seul parent décédait, la tutelle était confiée au parent survivant, mais le conseil se réunissait malgré tout. Et dans ce conseil se trouvaient des membres de la famille proche des deux côtés, avec indication claire des liens de parenté. Nous avons tous des enfants mineurs orphelins dans nos arbres, imaginez la mine d’informations pertinentes, auxquelles parfois nous n’avons pas forcément d’autre accès. De plus, si nous connaissons la date de décès du parent concerné, retrouver la minute du conseil de famille ne doit pas être trop complexe, car il a lieu dans le lieu de résidence de la famille, dans les quelques jours qui suivent le décès. Et si vous avez des ancêtres à Paris, pensez à l’intérêt de ces documents. D’un coup, vous reconstituez une fratrie, vous vérifiez des liens de parenté.
- Les déclarations de grossesse, obligatoires selon l’édit d’Henri II, qui dans le but d’éviter des enfanticides obligeait les femmes non mariées mais enceintes, à déclarer leur grossesse. Cette déclaration était fréquemment faite devant une instance judiciaire de premier ressort, et pouvait révéler des détails absolument passionnants. Nous n’allons probablement pas pouvoir les utiliser – sauf miracle – pour remonter la piste de nos enfants abandonnés, mais pour nos petits de père inconnu, la lecture attentive de ces actes peut apporter un nouvel éclairage sur la vie de leur mère.
- Les dispenses de consanguinité, présentées auprès des Officialités, juridictions ecclesiastiques, sont également des mines de renseignements, puisqu’à chaque dossier de dispense est annexé un arbre plus ou moins succinct. Avoir l’indication de l’ascendance de nos ancêtres sur trois ou quatre générations, faite à l’époque par le curé du village, avouez que c’est sympathique.
C’est également dans les archives judiciaires, au niveau national – Archives Nationales – ou départemental, qu’on trouvera les dossiers de naturalisation, les présentations de lettres d’office, pour les charges royales qu’on connait, mais aussi pour les professions réglementées, comme les sage femmes entre autres ….
Bref, une source particulièrement intéressante pour compléter nos recherches.
Mais comment s’y prend on et où trouve t’on tout ca ?
Ici comme dans les archives notariales, il n’y a pas de miracle, il nous faudra nous déplacer dans les services d’archives compétents, y éplucher leurs inventaires détaillés, dont quelques uns sont en ligne, et accepter comme pour les actes notariés, de passer du temps à mettre la main sur le document convoité.
Voici de façon succincte un petit aide mémoire des séries qui vont m’ intéresser dans les mois à venir.
Archives Nationales Pierrefitte
Sous série BB11 : A partir de 1800 – Naturalisations, changements de noms
Sous série BB10 : dossiers personnels de notaires
Sous série BB15 : dispenses de mariages après 1800
Série W : Tribunaux Révolutionnaires
Sous série Z10 : fonds de l’officialité de Paris, contenant les dossiers de demande de dispense de consanguinité
Archives Nationales Soubise
Série Y : le Chatelet, instance de premier ressort à Paris, où j’espère trouver un certain nombre de dossiers de tutelles d’enfants orphelins, les insinuations judiciaires de certains actes notariés, des scellés de décès, bref des renseignements qui valent de l’or dans une généalogie parisienne.
Archives départementales
Série U : c’est là que je trouverai les répertoires – peut être – et les minutes des dossiers des juges de paix, post Révolution, et donc ici encore des conseils de familles, des scellés, et quelques litiges croustillants que mes ancêtres auront fait régler devant un juge.
Série B : pour la période de l’Ancien Régime, j’y trouverai les minutes des prêvots ou baillis, et les fonds des sénéchaussées.
Série G : C’est là que les évêchés sont supposés avoir versé leurs archives, et donc là qu’on trouve avant la Révolution les précieux dossiers de demande de dispense … Il semble que certains évêchés, dont celui de Poitiers, n’aient pas encore fait ce versement. Comme toujours, une question intelligente et posée avec amabilité au Président de salle permettra de vérifier ce qu’il en est.
Il est de tradition qu’au cours du séminaire, nous allions visiter un service d’archives. Cette fois, nous sommes allés visiter les Grands Dépôts sous la conduite de Françoise Hildesheimer – excusez du peu ….. avoir un guide de ce niveau dans cet endroit chargé d’histoire, quel souvenir fabuleux – qui nous a ensuite prodigué de précieux conseils sur la façon d’aborder nos recherches dans ces fonds qui restent encore peu étudiés.
Pour terminer, voici quelques indications bibliographiques que nous ont conseillées Jerôme Malhache et Françoise Hildesheimer, et que je viens d’ajouter sur ma lettre au Père Noël.
- Dictionnaire des institutionS de la France – M. Marion – Editions Picard – ISBN 2 7084 0572 1
- La justice du Roi – Arlette Lebigre – Albin Michel – ISBN 2 226 03405 6
- Les institutions de la monarchie française à l’époque moderne – Bernard Barbiche – PUF – ISBN 2 1305 19407
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