En 1708, Anne Crelot a environ 65 ans. Elle est encore en pleine santé, quand le 18 mai 1708 elle se présente de bon matin à l’étude de son notaire, maitre Mathieu Goudin, rue Montmartre. Elle est venue en voisine, elle habite rue du Croissant, à quelques pas de là.
Anne Crelot est séparée de biens de son mari, Mathurin Goret, ingénieur dans la flotte du Levant, basée à Toulon. Le couple a eu un fils, Jean Mathurin, et au moins trois filles : Anne Angélique, Marie Geneviève, Charlotte et peut être une quatrième, Françoise. En 1708, Marie Geneviève et Anne Angélique sont mariées. Les contrats de mariage ont été l’occasion pour la mère de faire une donation importante à ses deux filles.
Si Anne vient ce matin là faire son testament, c’est pour prévoir le sort réservé à son fils Jean Mathurin, âgé d’environ 27 ou 28 ans.
5 propriété de la part et portion mobiliaire et immobiliaire
6 que Jean Mathurin Goret son fils poura amander
7 en sa succession future aux enfants qui naitront de luy
8 en légitime mariage, et a deffault d’enfants a ses soeurs
9 auxquelles ladite testatrice donne et legue la propriété
10 desdits biens, a la charge de l’usufruit de ladite part
11 et portion la vie durant dudit Jean Mathurin Goret
12 lequel usufruit elle luy laisse pour sa subsistance
13 sans qu’il puisse engager ny hipotequer le fonds
14 ny que ledit usufruit puisse estre saisy et arresté par
15 ses creanciers, voulant que ce qu’il y aura de mobilier
En bref, sans déshériter son fils, Anne Crelot lui refuse la propriété de sa part d’héritage, lui permettant uniquement de toucher les revenus du capital pour lui permettre de vivre. Qu’a donc fait Jean Mathurin pour que sa mère le mette ainsi sous la tutelle de ses soeurs, sa vie durant, ou le fasse dépendre financièrement des enfants qu’il pourrait ensuite avoir ? Ce jeune homme est probablement fort dépensier – j’ai trouvé quelques actes de reconnaissance de dettes en son nom dans certains registres de notaires – et c’est ainsi que sa mère s’assure qu’il ne dilapidera pas sa part d’héritage, pour se retrouver ensuite sans moyen de subsistance.
Pour les deux notaires qui prennent l’héritage en note, il faut s’assurer que c’est bien la volonté d’Anne Crelot, et ils lui lisent et relisent le testament avant de lui faire signer.
27 auxdits notaires soussignés, puis à elle par l’un d’eux
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(3)
1 l autre present lû et relû qu’elle a dit avoir bien entendue
2 et y a persisté en l’Estude dudit goudin notaire, l’an
3 mil sept cent huit le dix huit May sur les neuf
4 heures du matin et a signé
Signé – Anne Crelot – Goudin
En juin 1727, Anne Crelot est malade et refait son testament. Pourtant concernant son fils, qui répond désormais au nom de Jean Mathurin Goret de Fontenay, et qui est officier d’infanterie, elle n’a pas changé d’avis, et maintient les mêmes conditions : propriété de sa part aux enfants peut être à naitre, usufruit pour le fils …
audit Jean Mathurin Goret qu à Charlotte Goret sa soeur ses enfans
aux enfans de chacun d eux en legitime mariage ou a deffault d enfans a leurs
presomptifs heritiers les plus proches du coste en ligne de ladite testatrice
voulant que lesdits deux enfans Jean Mathurin et Charlotte Goret se
contentent de l usufruit de leursdites parts et portions leurs vies durant
et qu il soit employé ou destinés a leurs nouritures entretiens et education
de leurs enfans et comme (.) qu il ne puisse estre saisy par aucuns
leurs creanciers a l effet desquelles substitutions les mobilier quelle
laissera quant ausdites parts et portions qui (.) reviendront a sesdits deux
enfans soient convertis et employés en fonds aux charges desdites substitutions
Jean Mathurin meurt le 14 mai 1755 rue Geoffroy l’Angevin à Paris.
Je n’ai pas encore trouvé s’il y avait eu des actes notariés après son décès, les recherches continuent, un fils plus ou moins déshérité par sa mère, officier d’infanterie et qui modifie son patronyme, le personnage est trop intéressant pour que je l’ignore.
[Anne_Crelot_Sosa_2767]
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