Le 20 avril 1926 nait à Paris une petite fille à laquelle ses parents, Daniel Karcher (1) et Jeanne Dabzat (2), donnent les prénoms de Lucie Christiane.
Ils viennent de milieux différents. Elle est fille d’un forgeron du Périgord, mort en Charente à Nieuil le 28 août 1893 (3). Montée à Paris dans les années 1910 pour y être lingère, elle n’a semble t’il pas gardé de liens avec sa famille. Lui est le descendant d’une lignée d’industriels alsaciens partis en Suisse après l’annexion de l’Alsace en 1871. Elevé à Bâle dans un milieu très aisé, il y a côtoyé des personnalités de premier plan dans le salon plutôt coté de ses parents – la mémoire familiale veut que Franz Liszt ait donné des conseils au jeune Christian Karcher, le frère ainé de Daniel (4) (5), qui pratiquait le violon avec art .
Daniel et Jeanne se sont rencontrés à Paris, elle lingère de 20 ans, lui industriel de dix ans son aîné, se sont aimés – beaucoup, si j’en crois une lettre de Daniel à Jeanne conservée dans les papiers familiaux -, ont eu en 1911 une première fille, Denise et se sont enfin mariés le 4 novembre 1920 à Paris.
Daniel est de nationalité suisse. Contrairement à son frère Christian il a toujours gardé cette nationalité et ne participe donc pas à la première guerre mondiale en tant que soldat. Il est réserviste de l’armée suisse, et reste à Paris avec sa « bonne amie » et sa fille. La guerre l’affecte malgré tout, car outre la mort au combat de son frère ainé, en 1918 Jeanne est atteinte par la grippe espagnole, qui va faire des ravages (6). Heureusement, elle en réchappe. De plus, des revers de fortune ont fortement entamé l’héritage de Daniel.
Qu’importe … La petite Lucie nait dans une famille désormais officielle, qui a connu de meilleurs jours, mais où on ne manque de rien. On se souvient juste avec nostalgie – et probablement une pointe d’amertume – des jours d’antan, quand on prenait du champagne au petit déjeuner comme le racontait Jeanne Dabzat – que j’ai connue les dernières années de sa vie.
Lucie vient au monde à la maternité de Port Royal, au 123 boulevard du Port Royal, à Paris. Son second prénom, Christiane, devient rapidement son prénom usuel, et sa mère le transforme en Yanou, petit nom tendre qu’elle lui donnera encore à la fin de sa vie.
Le 13 février 1928, Lucie Christiane « Yanou » n’a que 21 mois quand son père meurt, laissant une veuve et deux filles.
L’année de ses 3 ans, Yanou pose pour le photographe. Cette photo d’une petite fille adorable au regard triste, j’ai voulu la partager ici avec vous.
Lucie Christiane pour l’état civil, elle n’a jamais utilisé le prénom de Lucie – que ses petits enfants ignoraient jusqu’à ces derniers jours. Tout le monde l’a toujours connue sous son prénom usuel de Christiane. Pour ses amis, et pour moi, elle était Cricri. Pour ses deux petits enfants, elle était Babou, le diminutif de Babouchka, terme russe qui signifie grand mère. A travers son mariage avec Boris Snejkovsky, elle avait adopté et fait sienne la culture russe.
Le 20 décembre 2008, son coeur a cessé de battre, mais son aura est toujours près de nous. C’est en pensant à elle et à mon père, disparu le 20 décembre 2009, un an jour pour jour après le décès de Cricri/Babou/Yanou, en imaginant leurs réactions lors de chacune de mes découvertes généalogiques, que j’avance dans mes recherches et dans la connaissance de l’arbre de mes enfants.
[Christiane Karcher – Sosa 5]
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